Dans l’après midi du vendredi 25 avril, au Centre National d’Activités Socio Éducatives et Culturelles (CNASEC) de Talladjé, la compagnie théâtrale Sonantché venue de Tillabéri pour participer à Émergences, festival de théâtre à Niamey, a présenté son spectacle de théâtre intitulé « le bon fruit ».
Texte et mise en scène:Madame Adama Laki
Distribution : Seyni Djibo : féticheur Hamido / El hadj Samna Hannatou : Sibti, épouse du prince Halido / Issoufou Biga : le prince Halido /Abdoul karim Ousseini : Sacko , ami du prince Halido / Mahamadou Seybou : le chef du village
Halido, prince d’un pays de Sorkos, les maîtres de l’eau, est anxieux. Sa femme est en travail. Et depuis quelque temps, elle pousse, pousse, avec l’aide de la matrone, pour faire sortir cet enfant qui est le fruit de leur amour passionné.
Quand, enfin, montent les vagissements d’un nouveau né, Halido venu aux nouvelles ne peut s’empêcher de laisser éclater sa joie. Sa femme vient d’accoucher d’un beau bébé, un garçon qui sera un jour l’héritier du trône de son père.
Mais, cette vive joie est vite éclipsée par un terrible souvenir : en effet, selon les coutumes des Sorkos, cet enfant devra au préalable subir le test incontournable de légitimité, qui consiste à le mettre dans le fleuve, pour attester qu’il est bien son fils.
Et Halido, que le doute soudain habite, ne peut s’empêcher de se poser la grave question : « est-ce bien de moi que vient cet enfant ? »
Malgré toutes les protestations de sa femme Sibti, dont les pleurs égalent la rage, hélas impuissante, épouse qui a même recours à l’intervention de Sacko, l’ami d’enfance de son mari, Halido s’entête à faire subir le test de légitimité au nouveau né, sous les soins de Hamido, le guérisseur du village.
Sable. Calebasse. Lait. Pagne noir. Parfum. Beaucoup de parfum. Air poignant du bori. Danse de possession. Hamado, le guérisseur, appelle Harakoi, les génies de l’eau, les maîtres du fleuve. Il les appelle, longuement.
-Qu’on m’amène l’enfant hurle Hamado dont les paroles sont couvertes par le cri de désespoir de Sibti, qui a peur pour son enfant.
Le lendemain, de bonne heure, le guérisseur qui part au fleuve, en revient avec une terrible nouvelle : le nouveau né s’est noyé. La signification de cette noyade, aux yeux de tous, est claire.
C’est la consternation pour les villageois. Là, les responsables doivent trancher, prendre une décision pour punir la femme adultère. La sentence qui vient de la bouche du chef de village, est claire. Surtout ferme. Sibti, selon les coutumes, doit être conduite hors du village pour être dilapidée par les enfants. Pour Sibti, c’est l’amertume. Pourquoi une telle sentence viendrait de la bouche du chef de village, son beau père, qui n’est pas si étranger à sa grossesse ?
Mais le remords, pour une fois, ronge les uns et les autres. Le regret aussi. Et Halido, touché par l’état de sa femme, décide de lui pardonner. Le chef de village, ainsi que le guérisseur Hamido, le gardien des coutumes, décident de ne plus mettre en pratique de telles coutumes qui portent atteinte à l’intégrité humaine.
Histoire triste, mais qui finalement finit bien.
Théâtre de rite, de possession, chez les Sonantché, les descendants de Soni Ali Ber, le fondateur, « le bon fruit » tout en présentant des aspects spécifiques des coutumes locales, ne manque pas de dénoncer certaines pratiques qui portent atteinte aux droits humains. Et « le bon fruit » qui admet qu’il faut effectivement séparer le bon grain de l’ivraie, s’achève sur la si belle note que le pouvoir de l’amour peut conduire au pardon et à la repentance.
Bello Marka