Apres plusieurs années de léthargie, le cinéma nigérien est depuis quelques temps entrain de retrouver ses lettres noblesses. Ce regain d’activité observé au niveau du 7ème art nigérien, fait suite à l’engagement et à la détermination d’une nouvelle génération de cinéaste, constituée principalement de jeunes producteurs et réalisateurs. Afin de mieux comprendre cette « renaissance » du cinéma nigérien, nous avons rencontré pour vous Malam Ibrahim Mahaman Saguirou, le président de l’association des jeunes cinéastes du Niger.
Depuis quelques temps on parle du renouveau dans le cinéma nigérien, en tant que président de l’association des jeunes cinéastes du Niger qu’est ce qui explique ce « Come back » du cinéma nigérien sur la scène internationale ?
Au Niger nous avons eu le privilège d’avoir dés les années soixante une génération des cinéastes qui a marquée sont temps et qui jusqu’aujourd’hui continue de faire parler d’elle sur le plan artistique. Je ne reviendrai pas sur la fameuse période léthargique du cinéma nigérien. La certitude mienne est qu’aujourd’hui, il y’a de nouveau une génération des cinéaste talentueuse qui commence à faire ses preuves. Il y a des prix sur tous les continents et c’est à l’honneur du Niger. Même s’il est déplorable de constater que les médias de façon générale n’accordent pas une grande importance à ce mouvement positif d’une jeunesse qui se bat pour donner les images du Niger et de l’Afrique partant dans une certaine mesure du point de vue des nigériens et des africains.Car contrairement à certaines idées reçues, le cinéma n’est pas seulement du divertissement délectant. Le cinéma c’est avant tout un moyen de communication. Et sans doute l’un des canaux le plus utilisé aujourd’hui dans le monde pour véhiculer des messages. Vous conviendrez avec moi que ce n’est pas pour rien que le Rambo américain tue à lui seul tout une camp militaire ennemi et le cinéma est sans doute pour quelque chose dans la popularité des arts martiaux chinois mais aussi de la bonne bouffe et l’art culinaire français. Le cinéma est aussi une industrie, ça produit des richesses au même titre que le commerce et les industries classiques. Aujourd’hui Hollywood à un poids considérable dans l’économie américaine et pareillement pour Bollywood en inde. Il y a aujourd’hui au Nigeria une poussée des films commerciaux et je suis pour. Car petit à petit la qualité technique et du contenu s’améliorent. Mais dans tous ces pays il y a des capitaux et des systèmes qui soutiennent cette industrie. Même au Nigeria, il y a des mécènes qui investissent des capitaux dans ce mouvement.Donc pour un pays comme le Niger où il y a peut d’autres canaux audibles d’expression et d’accès à des réflexions pointues parce que d’une part il y a l’analphabétisme d’une grade partie de la population qui ne lui permet pas de lire et d’autre part il y a le manque simplement des penseurs tribuns. On ne voit pas beaucoup nos enseignants chercheurs et nos intellectuels par exemple dans les lieux populaires disséquant courageusement pour l’éveil des populations telle ou telle autre situation.A partir de ce moment le cinéma en dehors de son aspect commercial peut et doit aussi devenir un outil d’éducation des masses. Ici il est important de faire la différence entre beaucoup des télévisions et d’autres voies de com telle qu’internet et le véritable contenu diffusé. Les gens ont accès aux programmes mais desquels programmes parle t-on ?Notre mouvement se veut un mouvement artistique qui ne néglige rien dans la démarche. Il nous faut une économie qui va soutenir nos activités et pour maintenir l’attention du public sur nos productions, il nous faudra maintenir une certaine qualité dans le fond et dans la forme. C’est le pari de la jeune génération.
Le Niger dispose d’un Centre National de la Cinématographie, qu’est ce que vous attendez concrètement de ce centre et aussi de votre ministère de tutelle ?
Il faut dire que le centre national de la cinématographie du Niger dans son élan premier, est une extraordinaire chance pour le Niger et pour les cinéastes du Niger. C’est un centre à caractère professionnel. C’est à dire que les artistes et l’Etat siègent paritairement au conseil d’administration de ce centre. Et logiquement, je dis bien logiquement la gestion devrait être collégiale. Mais les textes du centre au fond ne peuvent pas le laisser accomplir la mission qui est sienne. Au Niger les nominations sont politiques, on nomme un directeur qui ignore comment ça marche, les cinéaste s’acharnent à le briffer pour comprendre la démarche en perdant énormément de temps et juste au moment où il commence à comprendre, rebelote on le change pour un autre. Sans oublier que le budget est dérisoire pour prétendre à des résultats extraordinaires. Le centre profite d’une poussée naturelle des jeunes qui veulent leur chose. Il serait injuste au stade actuel de jeter le spectre sur telle ou telle autre personne. À mon avis, il y a d’abord un travail de dépoussiérage à faire pour que les gens comprennent leur rôle. C’est là le point chaud de la relation du centre avec les cinéastes que nous sommes. Quand on a pris les attributions de l’ancienne direction de la cinématographie pour les transférer à un centre à caractère professionnel, c’est pour permettre aux artistes d’être au centre de décision de leur propre affaire c’est ce que je disais plus haut. Là où le bas blesse, c’est la tentation à un comportement glouton des directeurs généraux qui le plus souvent sont issus d’une nomination politique partisane. Notre problème est en ce moment un problème de ce qui est devenu le système de gestion de façon générale dans notre pays sous tous ces régimes dits pourtant démocratiques. Ce pourquoi je vais me permettre ces quelques parallèles. Alors dans ce cas de figure on sait bien comment sont les nominations politiques dans ce pays. On nomme les gens par récompense. Ces gens sont généralement âgées. Ils s’occupent d’abord de leurs postes en faisant continuellement des clins d’œil à leurs partisans. Ils ne se soucient point de ce pourquoi ils sont officiellement nommés. C’est la situation que nous vivons et pareillement pour tous les jeunes dans tous les secteurs. D’où la nécessité pour cette jeunesse molle que nous sommes de commencer à prendre notre responsabilité non pas pour se faire une place à la mangeoire mais pour dresser le front du combat pour notre avenir. Je crois que nous aurons d’autres éclaircissements dans peu de temps et à en croire la grogne de mes semblables, les choses ne tarderont pas à bouger. En ce qui concerne notre ministère de tutelle, il y’a d’abord un problème qui est général au Niger. Les fonctionnaires de l’Etat ne communiquent pas d’un ministère à un autre. C’est illusoire de penser que le seul ministère de la culture peut faire marcher le cinéma. Il y a des ministère aussi clé que celui la. Par exemple le ministère de la communication qui a en charge les canaux de diffusion. Nous n’avons plus des salles de cinéma, nous devons penser à en avoir de nouveau. Mais aussi les télés peuvent et doivent aussi jouer ce rôle de diffuseur. Mais regardez les programmes des TV au Niger c’est dominer par des programmes étrangers. Comment voulez-vous que ça marche ? Pour anecdote, je cherchais une fois un papier à l’ORTN pour avoir un financement étranger pour une production que je fais ici au Niger. Un directeur tellement qu’il ignore pourquoi il est à sa place ma lâché que nous sommes concurrents. Ailleurs les TV collaborent avec les producteurs indépendants pour avoir des programmes. Pourquoi par exemple faut t-il qu’une compagnie comme Airtel parce qu’elle est de capitalisation de l’inde se permettra t-elle d’inonder nos écrans avec les séries indoues ? Pourquoi chez Nestlé et son maggi il y a cette envie irrésistible de nous passer des séries mexicaines et brésiliennes ? Alors que de l’argent pourrait venir d’un tel partenariat. N’oublions pas que la fabrication des programmes nationaux en plus de refléter nos réalités en face du monde et la satisfaction d’une partie de notre propre consommation, permettraient de créer de l’emploie et accroitre le savoir faire de la jeunesse dans le secteur de l’audiovisuel. Cela se passe à la vue et au su des décideurs et des nigériens qui sont en place à l’intérieur de ses multinationales comme à l’intérieur des organes de diffusion privés et pires mêmes publics. Tout se passe dans ce pays comme s’il y a un énorme complot contre les jeunes et contre le développement. Mais l’espoir est toujours permis. Il existe des preuves des bonnes volontés chez certains décideurs. Donc le plus important, ce que nous nous mettons dans un premier temps en position de recherche de dialogue. Il existe des moyens dans ce pays mais il faudra se concerter pour que les gens comprennent qu’ils ne sont ni adversaires ni ennemis mais les différents postes d’une même équipe.
Vous avez fait honneur au Niger lors de la 23 ème édition du FESPACO, vous avez été désigné membre du jury, quel commentaire cela vous suscite ?
C’est tout a fait honorant pour n’importe quelle personne d’avoir une reconnaissance de ses paires ou de son corps de métier. Je suis ainsi honoré par le FESPACO pour cette responsabilité. Mais au delà de ma personne, à mon avis, au fond c’est cette jeune génération montante des cinéastes nigériens qui est visée. Les résultats des différents jurys officiels sont unanimement appréciés. C’est important pour l’institution FESPACO et c’est doublement honorant pour les membres des jurys
mercredi 15 mai 2013