Halimata Mayaki

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Par Webmaster  Publié le 15/01/2013
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Rencontre avec Halimata Mayaki, premier modèle nigérien international, aujourd’hui à la retraite.

Présentes toi à nos lecteurs 

Je m’appelle Halimata Mayaki. Je suis mannequin, je fais 1m77 et je pèse 57kg. J’ai commencé la mode à plein temps, j’avais 21 ans à ce moment. En Europe c’est un peu tard ; là bas les jeunes filles débutent cette carrière à l’âge de 14, 15, 16 ans. Avant je ne pouvais marcher qu’avec des baskets ou des sandales mais aujourd’hui j’arrive bien à marcher sur des talons aiguilles de 12 centimètres. C’est un monsieur appelé J. Alexander qui me l’a appris en une après midi à Paris.  Mais là, je ne suis plus en activité, je suis à la retraite.

La première fois que j’ai défilé c’était à une croisière chez Yves St-Laurent. Des prêt-à porter entre deux saisons, c’est ce qu’on appelle croisière.

 

Comment es tu arrivée dans la mode ?

C’est assez drôle. C’était en 1996 lorsque je suis parti en Martinique. Là il y avait un monsieur appelé Roger-Volny qui  faisait des petits défilés sur place, et, il m’avait proposé d’en faire un, puis un deuxième, ensuite il je faisais un grand chaque année, mais à côté j’étais toujours serveuse et garde d'enfant, je faisais ça ponctuellement.

Ce monsieur qui organisait des défilés travaillait avec Mounia, une ancienne mannequin d’origine martiniquaise. Elle a été égérie d’Yves St-Laurent. A l’époque, tous les ans elle organisait un défilé caritatif (humanitaire) pour récolter des fonds pour des hôpitaux ou des enfants sur place ; en occurrence ce défilé là c’était pour un hôpital pour enfants à Fort de France ;  et à cette occasion elle a fait un partenariat avec une agence de Paris en France. Un jour le directeur de cette agence était venu, et lorsqu’il m’a vu il m’a donné sa carte et m’a demandé de me présenter au niveau de leur agence une fois à Paris. A la même période j’ai été recontactée par le producteur du film IMUHAR UNE LEGENDE (être libre en Tamasheq) dans lequel j'avais joué (aux cotés de Guillaume Canet et de Marion Cotillard). Je suis rentrée en France pour assurer la promotion du film et du cout j’en ai profité pour intégrer l’agence en 1999.

 

Quel rôle joue cette agence ?

En général ces agences sont là pour te trouver des clients ; ça dépend de la spécialisation. Par exemple moi je ne faisais que du défilé, je n’étais pas commerciale comme on l’appelle dans le jargon ; une fille commerciale elle, elle va faire plus de la pub et du catalogue.  A cette époque on n’avait pas assez de travail. Par rapport aux filles européennes ou brésiliennes on avait 1/3 de casting, le marché n’était pas très bon, je ne défilais souventque tous les trois mois ; après tu as la haute couture et le prêt à porter, voilà. En fait c’est un cercle vicieux, c'est-à-dire que si tu ne fais pas un peu de pub pour que les gens te remarquent alors tu passes un peu les castings comme tout le monde.

En vérité j’ai commencé à revivre quand je suis parti en Italie en 2002 où j’ai été prise dans une agence de mannequins. J’ai habité là bas pendant plusieurs années. Là, le client appelle les agences pour dire qu’il a besoin par exemple d’une fille rousse qui fait 1m80, c'est-à-dire tu es obligé de passer par une agence pour trouver de clients je veux dire. J’avais vraiment bien travaillé parce que j’étais plus exotique si tu veux, plus ouverte ; donc c’était là que j’ai commencé à faire aussi de la pub et j’ai travaillé durant 2 ans chez Gian Franco Ferré qui est aujourd'hui décédé. Ce monsieur était styliste chez Christian Dior, mais bien avant il avait sa marque à lui ; J’ai travaillé dans sa maison de couture. J’ai fini ma carrière en fait à Milan mais toujours en travaillant avec mon agence à Milan et celle à Paris ; je faisais des aller et retour.

Après, je suis tombée enceinte en 2004. Là j’avais décidé d’arrêter mais pas parce que je le voulais. Avec mon bébé c’est très difficile d’une part, c’est un travail qui est assez irrégulier. Tu peux faire dix castings mais à la fin tu n’as rien, le client ne rappelle pas pour te prendre ; tu peux te taper un mois sans travailler, sans argent. Avec un enfant ce n’est pas compatible, en fait tu as besoin d’une stabilité financière. Voilà c’est qui a fait que j’ai décidé d’arrêter en 2005.

 

C’est quoi la mode pour toi ?

A la base ce sont les vêtements. En Europe c’est un peu plus complexe, parce qu’ils sont dans les tendances, c’est l’habillement par la création. C’est une sorte de mode d’expression de création vestimentaire. Là bas c’est vachement plus pointu. Tu prends les belges, ils ont un sens de la mode qui est un peu spéciale ; les français sont aussi connus par une chose, les américain par une autre, etc.

La mode c’est aussi une industrie, une réalité, une économie mais pas pour nous, pour les occidentaux ; parce que nous on est traditionnel. A mon sens la mode c’est une mode que, par exemple toi tu vas porter mais que d’autres personnes en la voyant vont avoir envie de la porter aussi.

 

Que penses-tu de la mode au Niger ?

Elle est un peu pauvre. C’est ce que je trouve dommage d’ailleurs. Normalement étant le pays où le FIMA est né on devrait avoir des structures un peu plus élaborées depuis tant d’années.

Il n’y a pas de plateau, de plateforme pour les jeunes créateurs. Ce n’est qu’aux deux dernières éditions qu’on a vu apparaitre les jeunes créateurs de tous les pays, mais aussi du Niger. Sauf qu’en faisant la comparaison avec les créateurs des autres pays on constate qu’on est un peu en retard. Mais ce n’est pas négatif, ce n’est pas une critique négative en fait. Aussi on n’a pas les mêmes supports que les autres pays je pense. Par exemple tu prends des pays côtiers comme la Côte d’Ivoire, le Benin ou le Togo où ils sont beaucoup plus modernisés, ils ont plus un goût de la mode que nous. Ici on en reste un peu plus traditionnel, donc pour les jeunes créateurs je trouve que c’est difficile en fait d’avoir une créativité une fois qu’on a cette créativité là. Le peu de créativité que tu as, pour la mettre en place et en pratique c’est compliqué à mon sens ; mais il ne faut pas qu’ils désespèrent.

Je sais qu’il y a cette école qu’Alphadi est en train de mettre en place depuis plusieurs années.

Il y a aussi une jeune créatrice appelée Kadi Mariko. Elle, je trouve qu’elle fait un travail assez génial ; elle essaie de former des jeunes filles, elle partage son savoir même si elle est en plus grande partie autodidacte. Elle avait fait une formation avec des jeunes filles pour leur apprendre des coupes nouvelles, des méthodes de travail nouvelles avec des matières.

Une fois, La jeune créatrice a dit aux jeunes filles de se servir de leurs propres inspirations, en retour elles lui ont demandé ce que c’est l’inspiration ; c’est pour vous dire les difficultés qu’on a ici.

Personnellement j’avais un projet de faire une ligne de vêtements pour bébé avec des matières de Wax et Bazin. La difficulté elle est que si tu amènes un model la personne a des difficultés même de te refaire ça à l’identique, il y a toujours un problème de finition. Et la problématique elle est que les gens ont appris une certaine méthode et ne savent pas sortir de ça. Nous sommes trop en retard par rapport aux autres pays où les finitions sont impeccables. Il n’y a que les forgerons pour l’instant qui arrivent à vraiment reproduire les choses. Il y a aussi le fait que les gens ont tellement faim qu’ils voient tout de suite les choses à court terme ; ils ne voient jamais à moyen et à long terme.

 

Parle-nous du FIMA

J’ai aidé un peu à l’organisation surtout avec Sylvie et Aurélie pour la mise en place des défilés sur les 3, 4 jours et en même temps j’ai défilé. Parmi ces défilés il n’y en qu’à deux éditions auxquelles je n’ai pas défilé, la première en 1998 et celle de 2002.

A ses débuts moi je pensais que le FIMA allait être une sorte de tremplin. L’avantage est que c’est à travers le FIMA que le pays est connu à l’international aujourd’hui ; avant on était connu que par la rébellion et souvent on nous confondait avec le Nigéria. Une bonne chose est que, point de vue notoriété on a une sorte de scène internationale qu’on n’avait pas et du cout même au départ il y a quand même beaucoup de grands créateurs internationaux qui sont venus. Ça aurait dut générer beaucoup plus de choses pour la création ici sur place je pense.

 

Quels sont tes projets ?

Pour l’instant j’ai mis un peu de côté mon projet de création de ligne de vêtements pour bébé, c’est un projet que j’ai depuis des années. Quand j’étais en Europe j’étais vachement dans la théorie. Je suis arrivée ici il y a trois ans, j’ai essayé la pratique c’était compliqué. Mais je ne vais pas rester non plus et partir un jour d’ici à ne rien faire.

Là j’ai rencontré une sœur depuis quelques temps. Elle travaille dans la boutique du grand hôtel. En fait, elle avec les femmes détenues de la maison d’arrêt de Kollo (Tillabéry) avaient mis en place une sorte d’activités de couture ; là avec la sœur je suis en train de voir ce que je peux faire. Mon idée c’est de partager ce que j’ai vu, les inspirations pour les aider à faire une sorte de collection et après peut être la vendre ponctuellement, faire un événement de vente pour ça.

 

Parle-nous d’un de tes souvenirs en Europe

Je me rappelle en 2001 j’ai participé à un concours appelé « Best Model of the World » où j’ai représenté le Niger étant déjà là bas. Cette compétition se passe tous les ans en Turquie et est retransmise en direct à la télévision. Plus de 100 pays se réunissaient à ce concours de défilé, il y avait aussi la chorégraphie qui en faisait parti, c’est comme le concours Miss France. Je n’ai pas gagné mais ça a été une belle expérience quand même.

 

Quel est ton dernier mot ?

J’espère qu’on va trouver une solution pour déboucher l’avenir à tout le monde en fait. Que les projets puissent se faire, que les gens puissent accepter d’apprendre et que nous on puisse un peu tirer haut le pays petit à petit, mais comme on dit kalah-sourou (avec patience en Zarma). Merci Fofo pour cet entretien.                           

     

 

  

mardi 15 janvier 2013

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